d) Le piégeage dans le couvain femelle

On le répète une nouvelle fois ; varroa se reproduit dans le couvain et près de 80 % de la population parasitaire s’y trouve en saison. On a évoqué le piégeage dans le couvain de mâle. Il existe plusieurs versions du piégeage dans le couvain d’ouvrière avec l’idée commune de limiter la ponte de la reine à certains cadres pour forcer varroa à parasiter cette zone du couvain et à enlever les cadres au fur et à mesure de leur operculation. (Animal and Plant Health Agency, 2017)

Des variantes existent, on va voir que le retrait complet de couvain est un piégeage extrême.

En pratique

La technique de base consiste à isoler la reine sur un cadre bâti, prêt à pondre, enfermé entre deux grilles à reines pendant 9 jours. Il existe des cages prêtes à l’emploi.

Cage-piège pour la reine

La grille à reine est un instrument apicole ne permettant pas le passage de la reine au travers de ses mailles, mais bien celui des ouvrières. Elle est souvent utilisée pour empêcher la reine d’aller pondre dans les hausses. La cage décrite utilise les mêmes espacements sur la grille pour cloitrer la reine sur un seul cadre.

Grille à Reine

Ensuite, on déplace la reine sur un autre cadre toujours dans sa cage. Chaque cadre où la reine a été isolée et a pondu est marqué, retiré de la cage et laissé dans la ruche jusqu’à l’operculation des derniers œufs pondus puis enlevé de la colonie. On répète l’opération trois fois de suite. (Calis 1999)

On peut optimiser le système en piégeant la reine sur un cadre déjà bâti en mâle, on a vu que ce couvain exerce un pouvoir attractif supérieur sur varroa.

On peut soit ;

Traiter les cadres de couvain enlevés (il existe un acide organique connu pour atteindre varroa dans les cellules operculées),

Créer des essaims (charge varroa à gérer, attention aux autres contraintes sanitaires)

Ou les détruire (grosse gestion à prévoir).

Piégaege

(Extrait de Animal Health 2017, p18)

Légende : la reine est isolée sur un cadre, enfermée dans une cage, elle peut continuer à pondre uniquement sur ce cadre. On la change de cadre au bout de neuf jours. Sur le schéma elle passe successivement du cadre A au B…
Le cadre fraichement pondu est laissé neuf jours de plus dans la ruche, jusqu’à l’operculation du dernier œuf, puis enlevé. Les varroas ont eu le temps de coloniser le couvain.
Comme la reine est cantonnée sur un cadre, il n’y a pas d’autre couvain ouvert disponible ; c’est là que réside le « piège à varroa ».

 

Le retrait complet de couvain, une variante extrême du piégeage !

Cette méthode a de nombreuses variantes, nous évoquons ici les principes de bases. La description est basée sur divers essai menés autour de cette méthode. (Buchler, 2009), (Animal and Plant Health Agency, 2017) Des adaptations sont évoquées, l’intérêt réside dans la compréhension des différentes méthodes qui y sont associées : création d’essaim et rupture de ponte associée, piégeage dans le couvain, administration d’un traitement ciblé sur période hors couvain.

On sépare complètement la colonie en deux parties.

Tout le couvain est placé dans une nouvelle caisse avec suffisamment d’abeilles et des réserves (une création d’essaim en soit). On gère cette partie comme un essaim artificiel.

La reine reste sur place avec des cires neuves, des réserves et on lui laisse les butineuses et des abeilles qu’on brosse (faire tomber des abeilles d’un cadre, en les brossant délicatement).

Brossage

Détail important ; l’idéal est d’abord d’isoler la partie contenant la reine en dessous de celle contenant le couvain par une grille à reine et attendre trois jours pour séparer. Ainsi, un maximum de varroas gagne le couvain.

Légende retrait complet de couvain
Ruche modélisée, cadre R=réserve, P=pollen, C=couvain, N=cire neuve, S= séparation ou partition.
La base de la méthode repose sur le retrait complet du couvain. Il est intéressant de travailler en « divisible » pour cette méthode.
On place tout le couvain dans une ruche au-dessus de la souche, en les séparant par une grille à reine.
La reine reste en dessous, avec réserves et cires neuves. Les varroas seront attirés par le couvain, au-dessus.
Trois jours plus tard, on sépare les colonies, la reine restant sur place, elle récupère les butineuses et on ajoute des abeilles en brossant, il y aura un petit créneau sans couvain fermé (redémarre à zéro).
La colonie fille se remère comme un essaim (rupture de ponte…). On peut intégrer des gestions avec les acides organiques.

 

Dans l’essaim créé avec tout le couvain.

Il est géré comme un essaim artificiel, comme décrit précédemment, il peut y avoir une période sans couvain juste avant la reprise de ponte de la future reine.

-On peut mettre à profit cette période pour appliquer un acide oxalique.

-Un autre acide organique qui peut atteindre varroa dans les cellules de couvain peut aussi être utilisé, immédiatement après la création de l’essaim.

-Introduction de couvain ouvert (cadre d’œufs et de larves non operculées) 15 à 21 jours après la création de l’essaim, et retrait dès qu’il est operculé, varroa s’y précipite car tout le reste du couvain est operculé. On peut renouveler l’opération avant la reprise de ponte de la nouvelle reine.

Légende : utilisation d’un cadre de couvain piège
La figure ci-dessus montre que l’introduction d’un cadre de couvain ouvert dans une colonie en remérage, peut servir de piège pour les varroas phorétiques qui s’accumulent dans la colonie.
J1 correspond au dernier œuf pondu, (à la création de l’essaim, au retrait/encagement de la reine), donc 9 jours plus tard tout le couvain sera operculé. A ce moment, les varroas qui naitront devront rester phorétiques. Il n’y a pas encore de nouveau couvain à parasiter.
Vers J 15, on introduit du couvain ouvert (cadre ou partie de cadre), les varroas y seront attirés et vont s’y précipiter. On retire ce couvain à l’operculation (9 jours plus tard) et on le détruit.

 

Dans la partie avec la reine :

On est presque dans le cas de figure d’une reine libérée après un encagement, en phase de reprise de ponte.

-Soit on introduit dès la séparation un cadre de couvain ouvert qui servira de piège et qui sera enlevé 9 jours plus tard, operculé et après avoir attiré les varroas.

-Soit on lui applique un acide oxalique avant que de nouvelles cellules soient operculées. Attention, on est en période estivale, deux applications semblent plus efficaces (voir acide oxalique avec encagement de reines), mais le créneau d’intervention est réduit.

-Soit on gère cette colonie avec un traitement d’été « classique » adapté à son statut et à sa population.

 

Discussions

Ce sont des méthodes qui demandent du temps et un suivi régulier, beaucoup de manipulations.

Egalement une gestion des cadres enlevés et infestés de varroas, il faut penser au travail de recyclage.

Méthodes lourdes mais qui offrent des possibilités nombreuses en termes de multiplication du cheptel et de gestion intégrée de varroa. Des adaptations sont possibles.

L’utilisation de médicaments adaptés est favorisée par la rupture de ponte et la phase hors couvain.

Il faut aussi réussir à les intégrer dans la saison apicole sans nuire à la récolte ou à la préparation à l’hivernage…